Sensibilisation

Smartphone: tueur d’ennui et de créativité?

C’est au coeur de cette année académique marquée par le thème « mondes numériques » que je suis tombée par hasard sur une chronique de France Inter qui m’a fortement interpellée. Le titre: « Ode à l’ennui et à l’observation ». Son auteur, l’écrivain français Olivier Bourdeaut, y amène une réflexion sur l’utilisation prédominante des smartphones dans notre société.

Après avoir eu la chance d’assister au dialogue avec Milad Doueihi, Docteur Honoris Causa 2018 de l’UCL, la confrontation entre deux conceptions du monde numérique m’a alors frappée. Là où l’un affirme que l’imagination est diminuée par la prédominance du monde numérique, l’autre assure au contraire que celui-ci apporte une nouvelle forme de culture et donc par-delà d’imagination. Réflexion autour de conceptions différentes qui ne sont peut-être pas si contradictoires.

 

 

Dans sa chronique, Bourdeaut affirme que l’imagination est le fruit de deux choses fondamentales: l’ennui et l’observation. Or pour lui le téléphone intelligent est l’ennemi de ces deux pratiques indispensables au développement du cerveau humain. L’auteur affirme avec humour que c’est lorsqu’il a remarqué qu’il était devenu accro aux vidéos de chat sur les réseaux sociaux qu’il a choisi de se débarrasser de son smartphone. « J’ai décidé de me séparer de ce téléphone si intelligent qu’il me rendait parfaitement débile » assène-t-il. L’auteur prétend effectivement que les réseaux sociaux nous permettent de regarder en permanence le résultat de l’imagination brillante des autres et cela au détriment de la notre.

 

En effet, avec l’avènement des nouvelles technologies, la manière dont les gens passent leur temps a radicalement changé. Dans les salles, files d’attente ou encore sur les quais de gare, la plupart des nez sont rivés sur toute sorte de tablette, liseuse et smartphones. Chaque seconde d’ennui est tuée par un effleurement d’écran. Selon Christopher Lynn, professeur d’anthropologie à l’Université de Columbia, l’utilisation du smartphone répond au besoin fondamental de l’être humain de tuer l’ennui à tout prix: « Quand vous êtes habitués à une stimulation constante, dès qu’elle vous manque, vous ne savez plus quoi faire de vous-mêmes. Quand vous êtes habitués à ne plus avoir aucun temps mort, tout vide produit de l’angoisse. Et là, nous avons le smartphone, il est le perpétuel soulagement à nos angoisses. ». Mais tuer l’ennui par le smartphone et les réseaux sociaux entraîne-t-il forcément le déclin de la créativité?

 

Dans son article, Bourdeaut part du constat que le temps passé sur un smartphone pourrait l’être pour des activités plus contemplatives qui permettraient à elles seules d’amener de la créativité et de stimuler notre imagination. Selon lui c’est parce que l’esprit divague qu’il arrive à créer et l’attention qu’un smartphone demande aspire tout ce temps que l’on réservait jadis à l’observation et la réflexion personnelle. Il omet toutefois qu’une nouvelle forme d’imagination et de créativité pourrait ressortir de ces nouvelles pratiques technologiques.

 

Milad Douiehi a en effet une conception tout à fait différente de cette prédominance du monde numérique. Toute son approche se fonde sur la notion qu’il a créée: l’        « humanisme numérique ». Grâce à cette dernière, il analyse la manière dont les outils et les pratiques dans un espace hybride interrogent et transforment notre rapport à la culture et au monde. Pour prolonger ce débat et comprendre la pensée de cette intéressante personnalité, je vous invite dès lors à aller découvrir l’article de Marie dans le focus.

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